Aux Etats-Unis, « la discrimination positive a permis d’augmenter la proportion de Noirs et d’Hispaniques parmi les étudiants des meilleures universités »

Aux Etats-Unis, les universités ont introduit des mesures de discrimination positive en faveur des Afro-Américains dès les années 1960. Mais elles sont indirectes, et certains Etats sont revenus sur ces programmes, explique Daniel Sabbagh, directeur de recherche au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po et spécialiste du sujet.

Quand les Etats-Unis ont-ils commencé à collecter des statistiques ethniques ?

Au sens large, dès 1790, dans le cadre du recensement. A l’origine, les agents recenseurs étaient chargés de noter la « race » dans leurs relevés, en fonction de leurs propres constatations – sans nécessairement poser la question aux personnes concernées. En 1970, ce mode de collecte a été remplacé par l’autodéclaration. Un changement sans lien avec le mouvement des droits civiques, uniquement motivé par des considérations budgétaires : transmettre ces questionnaires par voie postale revenait moins cher que l’envoi systématique d’agents recenseurs sur le terrain.

Dans quelles circonstances les universités américaines ont-elles instauré la discrimination positive (« affirmative action », en anglais) ?

Face au mouvement pour les droits civiques et en réponse à la vague d’« émeutes raciales » observées dans de nombreuses villes américaines de 1964 à 1968, certaines universités ont mis en place des programmes de discrimination positive. Un exemple est Princeton [New Jersey], où, en 1968, un an après les émeutes survenues dans la ville voisine de Newark, le nombre d’étudiants afro-américains en première année a été multiplié par trois. Ces universités ont agi en ordre dispersé, de manière décentralisée, et les initiatives lancées ont parfois pris la forme de quotas.

Aux Etats-Unis, « la discrimination positive a permis d’augmenter la proportion de Noirs et d’Hispaniques parmi les étudiants des meilleures universités »

En 1978, l’arrêt Bakke de la Cour suprême a établi l’inconstitutionnalité de ces quotas raciaux, à de rares exceptions près. En revanche, il a autorisé les programmes d’affirmative action présentant un caractère flexible et informel et destinés à promouvoir la « diversité » de la population étudiante, y compris la diversité ethnoraciale.

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En 2003, un nouvel arrêt de la Cour suprême a précisé que, outre les quotas, l’attribution automatique aux candidats noirs ou hispaniques d’un nombre prédéfini de points supplémentaires était inconstitutionnelle. Cependant, la Cour a entériné le principe d’une discrimination positive informelle visant à atteindre une « masse critique » d’étudiants noirs et hispaniques, sans plus de précision.

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