TVN24, la première chaîne d’information de Pologne, menacée de fermeture

« Je n’aurais jamais imaginé vivre cela au Parlement », confie Agata Adamek, figure emblématique du service politique de TVN24, chaîne d’information continue du réseau TVN, dans le collimateur du gouvernement national-conservateur au pouvoir en Pologne. Attablée à la terrasse d’un café à deux pas de la Diète, où le parti Droit et justice (PiS) a fait adopter, le 11 août, une loi controversée sur l’audiovisuel, la journaliste ne cache pas son émotion.

En interdisant l’attribution d’autorisations de diffusion aux médias contrôlés « directement ou indirectement » par des entités extérieures à l’espace économique européen, le texte voté par la Chambre basse du Parlement – et désormais entre les mains du Sénat – pourrait compromettre l’avenir de la chaîne, propriété du géant américain Discovery.

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« Ce qui m’a bouleversée, ce n’est pas tant que les débats portent sur l’avenir d’une chaîne pour laquelle je travaille depuis si longtemps, mais, plus encore, de constater à quel point les convictions peuvent changer », précise la journaliste. En près de vingt ans d’existence sur le territoire polonais, TVN24 a provoqué plusieurs scandales, avec ses révélations touchant les gouvernements successifs, indépendamment de leur couleur politique. « Mais jamais il n’avait été question de fermer la chaîne, même sous le premier gouvernement PiS [2005-2007]. »

Restrictions d’accès à l’information

Dès le retour du PiS au pouvoir en 2015, les relations entre la chaîne et le gouvernement se sont fortement dégradées. Première chaîne d’information du pays et concurrente directe de la télévision publique TVP, transformée par le gouvernement PiS en véritable organe de propagande, TVN24 a connu plusieurs tentatives d’intimidation.

Outre des déclarations diffamatoires de membres du gouvernement et des réductions d’achat d’espaces publicitaires par les entreprises publiques visant directement le média au portefeuille, il est arrivé que ses journalistes subissent des restrictions d’accès à l’information, confie Dominika Stepinska-Duch, membre du conseil d’administration de TVN, rencontrée dans ce contexte particulièrement tendu.

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Depuis plus d’un an et demi, la chaîne est en attente du renouvellement de son autorisation de diffusion par le Conseil national de la radiophonie et de la télévision (Krrit). Un délai anormalement long pour une procédure de routine, qui n’a pu que susciter l’inquiétude au sein de la direction, qui sentait que les moyens de pression allaient changer de nature. « Rien dans le droit ne permettant [au Krrit] de nous refuser ce renouvellement, il ne restait au gouvernement qu’à changer la loi », analyse Mme Stepinska-Duch.

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