Skate : « Casser l’image clichée de cet univers », Marina Correia, championne du monde de longboard dancing

« Ça fait du bien », lance dans un large sourire Marina Correia, officiellement championne du monde de longboard dancing depuis lundi, dans la catégorie femmes sponsorisées. « Etre reconnue comme la meilleure pour l’édition 2020, ça me rend très fière. » En raison du contexte sanitaire, le championnat du monde du longboard dancing, So You Can Longboard Dance ?, qui se déroule habituellement aux Pays-Bas pendant un week-end, s’est tenu en ligne. Les candidats étaient évalués à travers leur performance vidéo.

Les ingrédients pour gagner ? Un décor qui fait rêver, Nice et sa Promenade des Anglais au moment du coucher de soleil, des pas fluides, des figures impressionnantes et un peu de vitesse. Le tout, sur une musique entraînante. « Les jurys m’ont demandé si j’avais accéléré la vidéo, ils ont été impressionnés de la rapidité dans laquelle j’enchaîne mes mouvements. Mais comme on peut le voir avec les personnes qui m’entourent, il n’y a aucune modification même si on a dû réaliser au moins trente essais avant de réussir la vidéo. »

« Je me lance sur la planche et je laisse mon corps s’exprimer »

Marina Correia est née au Cap-Vert et est arrivée à ses 14 ans à Nice. Trois ans plus tard, elle se lançait dans la discipline, par curiosité. « J’avais deux amies du collège qui avaient une planche et qui roulaient avec. Un jour, j’ai voulu essayer. Maintenant, c’est ma passion. Je ne me déplace jamais sans. Je souris toute seule tellement je suis contente quand je suis sur ma longboard. »

Son histoire avec ce sport s’est transformée quand, après une présentation de nouvelles planches dans un magasin de Nice, la marque Sector9 lui en a offert une tout en lui proposant de la sponsoriser si elle postait des vidéos. Elle précise : « Au début, il faut beaucoup de force mentale. J’ai commencé en faisant quelques petits pas de danse, puis à essayer d’attraper ma planche. Mais les figures, c’est très technique donc il faut être patient et croire en soi. Pendant un an, je m’entraînais sur la Prom, au niveau d’Opéra plage où j’observais beaucoup de gens en faire et petit à petit, j’ai évolué. Je pense que ce qui a interpellé la marque, c’est ma motivation mais aussi mon style. » Cinq ans après, elle atteint près de 14.500 abonnés sur Instagram.

Skate : « Casser l’image clichée de cet univers », Marina Correia, championne du monde de longboard dancing

Son style, elle l’exprime à travers sa pratique. « Je mets mes écouteurs, je me lance sur la planche et je laisse mon corps s’exprimer. Quand j’avance, il n’y a plus rien qui compte. C’est tout un mode de vie, c’est de l’art. »

« Une victoire pour toutes les petites filles qui ont besoin de représentation »

La scène du longboard dancing s’agrandit, notamment grâce à la visibilité sur les réseaux sociaux. Malgré cet essor, c’est toujours un combat pour Marina Correia de s’imposer dans le domaine. « Je me bats avec d’autres sportifs à travers des projets pour casser l’image clichée de cet univers. Non, ce n’est pas un jeu, non, ce n’est pas réservé aux personnes blanches, de sexe masculin avec des bonnets et des vêtements larges. J’ai aussi ma place en tant que femme noire et cette victoire, c’est pour moi mais aussi pour toutes les petites filles qui ont besoin de représentations. » C’est la première fois qu’une femme noire remporte un titre d’un championnat du monde dans cette discipline.

Une distinction qui a fait réagir sur Twitter, où 6.344 personnes la suivent. Lorsqu’elle annonce fièrement sa victoire en soulignant le caractère inédit par rapport à sa couleur de peau, certains internautes lui reprochent « de ne pas être assez noire ». Elle rétorque en publiant : « Je suis métisse de par mes origines capverdiennes et brésiliennes, mais je suis une femme noire, avec des parents noirs, une famille noire. »

Malgré cette vague de commentaires insensés, la longboardeuse se concentre sur ce qu’elle a remporté. « Ça ne représente rien pour moi, c’est peut-être 5 % des messages que j’ai reçus. J’ai eu beaucoup plus d’amour et de soutien que de haine. Mais c’était important de le préciser, pour gagner en représentation dans la communauté. »

Elle développe : « La représentation, c’est très important. Je me rends compte que je suis un exemple pour des petites filles, elles se disent qu’elles aussi, elles peuvent le faire. A leur âge, je ne voyais personne qui me ressemblait à la télévision. »

Dans l’engagement et le partage, Marina Correia envisage aussi une alternative à sa carrière sportive. « Je pense à ma santé, si je me casse une cheville par exemple, qu’est-ce que je fais ? Il faut penser à long terme malgré tout. C’est pour ça que j’ai commencé une licence à l’université de lettres modernes à Nice ». Elle a déjà la tête pleine de projets : « J’aimerais organiser des séances de longboard avec des enfants dans des hôpitaux ou dans des orphelinats, pour leur changer de leur quotidien. »

En attendant, l’étudiante donne des cours sur la Promenade des Anglais les week-ends. Pour la contacter, rendez-vous sur son Facebook ou son Instagram.

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