Islam et laïcité : le schisme de la gauche

Elle n’a pas encore réellement investi le champ électoral, mais la querelle ressemble à la plus violente que la gauche ait nourrie en son sein depuis longtemps. Aujourd’hui, ce n’est plus sur des programmes économiques que la gauche se déchire, mais sur la religion et la laïcité, avec, en toile de fond, le terrorisme et la montée de l’islam radical.Islam et laïcité : le schisme de la gauche Islam et laïcité : le schisme de la gauche

Prise en étau entre un Front national qui a capté une partie des catégories populaires et un électorat musulman qui ne lui est plus spontanément acquis, la gauche française se perd dans un grand débordement d’invectives qui menace de la fracturer durablement. « Jamais je n’aurais pensé que la laïcité, fondement de la République, redeviendrait un enjeu politique et intellectuel », remarque le politiste Laurent Bouvet, proche du Parti socialiste.

Au cœur des discussions, le voile, bien sûr (pour ou contre, notamment, son interdiction à l’université), la nationalité (le combat sur sa déchéance pour acte de terrorisme a échauffé les esprits), mais aussi une multitude de sujets de tous les jours, des menus « sans porc » dans les cantines au siège qu’un machiniste de la RATP refuse d’occuper si une femme s’y est assise, en passant par le foulard d’une mère accompagnatrice des sorties scolaires. De quoi animer les déjeuners de famille comme les colloques – sans compter les ricochets de cette dispute sur le militantisme féministe, en pleine division lui aussi.

Les mots, armes de la guerre

Islam et laïcité : le schisme de la gauche

Comment nommer les deux camps ? C’est la première difficulté, tant les mots sont l’une des armes de la guerre. Y a-t-il désormais une « gauche relativiste », qui trouverait des excuses sociales ou postcoloniales à l’intégrisme et au terrorisme, contre une « gauche républicaine et laïque », pour laquelle « défendre les droits des femmes et la laïcité permet de désamorcer à la fois la propagande raciste et djihadiste », comme l’affirme la journaliste ­Caroline Fourest ?

Le combat se mène-t-il entre « multiculturalistes » démocrates et « identitaires » républicains ? Reprenant les termes utilisés par les féministes des années 1970, les universitaires parlent plutôt d’un clivage entre « universalistes », tenants d’une République une et indivisible, égal creuset de tous les citoyens, et « différentialistes », qui revendiquent le droit à la différence.

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